Olivier Klein a remis à Najat Vallaud-Belkacem, Patrick Kanner et Hélène Geoffroy, le 28 mars, un rapport sur la rénovation du patrimoine scolaire dans les quartiers populaires intitulé "Favoriser la rénovation du patrimoine scolaire des quartiers populaires pour créer une école moderne et attractive".
La ministre de l'Education nationale, son collègue à la Ville et la secrétaire d'Etat avaient missionné le maire de Clichy en octobre dernier pour réfléchir à la manière d' "accompagner au niveau national la mobilisation concrète des moyens dégagés" lors du comité interministériel à l'égalité et à la citoyenneté de Vaulx-en-Velin qui s'était tenu six mois auparavant, le 13 avril 2016.
Le 3e Ciec avait confirmé que les groupes scolaires situés dans un quartier Anru 2 pourraient bénéficier de crédits de l'Anru pour leur construction ou leur rénovation. Une disposition déjà pratiquée durant le programme Anru 1; l'école Claude-Dilain de Clichy-sous-Bois, inaugurée en octobre 2015, en avait d'ailleurs bénéficié. Le Ciec avait également décidé que l'Etat mobiliserait le Fonds de soutien à l'investissement local (FSIL) et la Dotation politique de la ville (DPV) pour mener des travaux "immédiatement réalisables", et "achevés d'ici la rentrée 2016", dans les bâtiments scolaires les plus dégradés des quartiers prioritaires (voir notre article ci-dessous du 26 avril 2016).
Une mission déjà bien cadrée
La lettre de mission d'Olivier Klein lui demandait plus particulièrement d'identifier les blocages et les freins dans la mobilisation de ces crédits, "notamment de la DPV" ; d'établir une méthodologie de définition des besoins et des travaux susceptibles d'être financés dans le cadre du FSIL ; de définir le cahier des charges des écoles susceptibles d'être financées dans le cadre des projets Anru ; de définir la méthodologie permettant une articulation entre un volet urbain et une stratégie éducative.
Le maire de Clichy-sous-Bois a répondu à la commande et est allé au-delà à travers 16 recommandations qui, vue la date de remise du rapport, pourront inspirer le prochain gouvernement (à toutes fins utiles, il souligne d'ailleurs à deux reprises "le caractère transpartisan de cette thématique").
Olivier Klein n'était pas invité à demander davantage de financement public et il ne l'a pas fait. Toutefois, s'il constate que "dès à présent, des leviers financiers existent pour rénover les établissements scolaires", il indique aussitôt qu'ils seront sans doute "dotés d’un montant insuffisant au regard des besoins qui devraient ressortir de la phase de recensement".
Réaliser un diagnostic précis de l'état du patrimoine scolaire
Car sa toute première recommandation est en effet de "réaliser un diagnostic précis de l'état du patrimoine scolaire, en ciblant les QPV". Un travail qu'il envisage via l’intermédiaire des services de l’Etat en charge de l’Education nationale et de la politique de la ville (Dasen – PDEC) en collaboration avec les services des communes, dans le cadre du dispositif de gouvernance des contrats de ville. Et c'est ce travail qui permettrait de dresser un plan pluriannuel chiffré des besoins et des moyens à mettre en œuvre dans le but de réduire les différences entre les écoles des QPV construites pour la plupart en même temps que les "cités" et celles du reste du territoire.
Si les écoles en QPV sont parfois sous-calibrées par rapport au nombre d'enfants habitant dans le quartier, le recueil des besoins ne devra pas, dans son esprit, s'arrêter aux indicateurs démographiques. Le recensement devra aussi tenir compte du nombre d'enfants en situation d'hébergement dans certaines villes : il indique qu'il y en a 300 dans sa ville de Clichy-sous-Bois (900 à Aubervilliers). Olivier Klein attire également l'attention sur les écoles de type "Pailleron" encore debout dans le sud de la France (Montpellier, Marseille) et sur les établissements scolaires des Antilles qui nécessitent une mise aux normes de leur bâti en raison des risques sismiques.
Affecter une part de la DPV et du FSIL à la réhabilitation des écoles
Concernant les leviers financiers existants, il suggère d'affecter une part des enveloppes budgétaires de la DPV et du FSIL "exclusivement" à l’objectif de réhabilitation des établissements scolaires ou, à défaut, de prévoir un taux de subvention majoré aux projets dont l’objet traite de cette thématique.
Concernant la DPV (150 millions d’euros en 2017), il suggère à l'Etat de la verser "suffisamment en amont" pour prévoir des travaux de grande ampleur et de mettre en place un "véritable outil de suivi" des projets scolaires financés. Il demande également d' "améliorer la lisibilité des appels à projets en faveur des communes moins bien dotées en capacité d’ingénierie". Concernant le FSIL (1,2 milliard d'euros en 2017), il recommande de "communiquer davantage" dessus, d’accompagner les villes dans l’ingénierie des projets et d'améliorer la transparence de la procédure de sélection.
Il recommande également de "clarifier le règlement de l’Anru" pour intégrer "à titre exceptionnel" la possibilité de financement des collèges et la réhabilitation des écoles. Conformément à la commande interministérielle, il a planché sur une "méthodologie relative à une bonne articulation entre le volet urbain et la définition d’une stratégie éducative locale". Il suggère alors de favoriser le travail en "mode projet" sur l’offre scolaire "pour faire effet levier sur la qualité de l’offre scolaire et la transformation des quartiers". C'est-à-dire, par exemple : veiller à l’intégration de la question scolaire dans les projets de renouvellement urbain (analyse des besoins scolaires et périscolaires, intégration des parents, ouverture de l’école sur la ville...) ou encore "envisager d’intégrer la réflexion sur l’offre scolaire dans les critères d’innovation et d’excellence contribuant à la qualité du projet urbain, notamment autour des enjeux d’école connectée et numérique".
Le PIA sollicité pour financer le grand plan national
Mais il suggère d'aller plus loin en termes de financement en créant "un plan national avec une enveloppe budgétaire exclusivement dédiée à cet objectif". Il estime que "le cadre juridique du PIA conviendrait parfaitement pour consacrer un plan d’innovation à cette thématique". Le cadre financier également puisque "la troisième version du PIA comprend 10 milliards d’euros", rappelle-t-il. Selon lui, il suffirait de modifier les critères d’attribution du PIA (qui relèvent de la seule décision politique, précise-t-il) "pour que des sommes conséquentes soient allouées à la rénovation des établissements scolaires.
Enfin, il n'oublie pas que la réhabilitation "ne saurait être couronnée de succès que si un entretien régulier des locaux est effectué par la suite, afin d’éviter que des écoles soient si dégradées quelques années après avoir été construites ou modernisées". Et pour cela, il suggère d' "associer étroitement les collectivités territoriales (intercommunalités, métropoles, départements, régions) à l’effort financier".
Une école du XXIe siècle : sécurisée, connectée, modulable...
Olivier Klein fait aussi rêver quand il invite à "tracer les contours de l’école du XXIe siècle" dans les QPV. Il ne s'agirait pas uniquement de rénover les infrastructures, mais aussi de construire une école "en phase avec le développement durable" (isolation, insonorisation, normes thermiques...) ; "accessible aux personnes à mobilité réduite" ; "sécurisée" ; "connectée et numérique" (câblage, matériel informatique, wifi...) ; "modulable" pour faire face aux variations démographiques.
Une école qui serait également "élaborée avec une multitude d’acteurs provenant du quartier", comprenant des locaux utilisés au-delà du temps scolaire par "des élèves mais aussi des habitants". Et une école "ouverte et intégrée dans son environnement" proposant une diversité de services : espace parents pouvant devenir un espace de convivialité multigénérationnel, médiathèque / ludothèque, espace linguistique pour les enfants comme pour les parents (apprentissage du français), espace sportif, espace de jeux, ouverture des centres de documentation et d’information (CDI) hors du temps scolaire, protection maternelle infantile (PMI)...
... et dessinée dans le contrat de ville
"De cette manière, on obtient un projet éducatif local parfaitement intégré dans son environnement, construit en prenant en compte les aspirations des habitants (qui ne sont donc pas exclus du processus d’élaboration du projet) et qui pourront, qui plus est, utiliser les différents services proposés par l’espace éducatif", explique-t-il. Cette école serait liée par des conventions avec les services de l’Etat (Education nationale et Politique de la ville) ainsi que de la commune. Ces conventions feraient partie des contrats de ville.
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