La gestion de l'Agefiph (fonds d'insertion pour le secteur privé) et du FIPHFP (fonds pour la fonction publique) est "coûteuse et mal maîtrisée" et ces deux organismes se trouvent dans une "impasse financière", assure la Cour dans un référé rendu public ce lundi 8 janvier, adressé au mois d'octobre au gouvernement. Ces deux organismes assurent la collecte des pénalités des entreprises ne respectant pas l'obligation de 6% de travailleurs handicapés et mettent en oeuvre la politique d'insertion professionnelle des personnes handicapées.
Lors du Comité interministériel du handicap, en septembre dernier, le gouvernement avait déjà annoncé une réflexion "sur la pertinence de ce dispositif", en partant d'un constat assez largement partagé, que la Cour rappelle aujourd'hui en ces termes : "Au fur et à mesure que l’insertion des personnes handicapées progresse, les ressources de ces organismes, fondées sur la contribution des employeurs qui ne remplissent pas leurs obligations d’emploi, se réduisent inévitablement, alors même que les dépenses continuent à augmenter ou ne diminuent pas dans les mêmes proportions". "Il résulte de cet effet de ciseaux qu’un point de rupture financier est désormais envisageable pour chacun des deux fonds, ce qui rend nécessaire, si on souhaite les pérenniser, une réforme de leur cadre d’intervention et de leurs modalités de financement", poursuit le référé.
Qui plus est, les deux organismes ont parfois été mis à contribution sur des terrains qui n'étaient initialement pas les leurs. Ils ont par exemple été appelés à contribuer au financement des contrats aidés au simple motif "que les personnes handicapées peuvent prétendre au bénéfice de ces contrats". Le FIPHFP a en outre "consenti à prendre en charge, sous la pression des pouvoirs publics, le financement des aides à l'accessibilité, ce qui débordait jusqu’à une date récente ses compétences règlementaires".
Parmi ses nombreux constats, la Cour mentionne la "complexité de la déclaration que les employeurs doivent adresser aux deux organismes", ainsi qu'une collecte des contributions reposant sur "des modalités de calcul perfectibles". Elle évoque à ce titre de possibles effets pervers : tentation pour certains employeurs de "faire pression sur leurs agents pour qu’ils entament une procédure de reconnaissance de handicap", situation des employeurs "qui s’impliquent fortement dans l’amélioration des conditions de travail et la prévention des risques professionnels" et peuvent alors "présenter, de façon paradoxale, un taux plus faible d’emploi de personnes handicapées"...
Plus globalement, le référé souligne que "le FIPHFP aide au reclassement des personnes reconnues inaptes, ce qui soulève la question, dans la fonction publique, de la frontière entre handicap et prévention des risques socio-professionnels au travail, alors même que cette dernière relève d’une réglementation particulière et que l’employeur doit l’intégrer dans sa politique de gestion des ressources humaines". De même, certaines exonérations sont jugées contestables. Dont le fait que "la principale exonération de la contribution au FIPHFP, prévue par une disposition législative, bénéficie au ministère de l’Education nationale, au motif qu’il met en place un accompagnement des enfants handicapés scolarisés par des personnels spécialement affectés".
Pour la Cour, il ne s'agit pas de "limiter la réflexion engagée à un simple changement de modèle de financement de nature à garantir leur pérennité". Il convient, écrit-elle, de "s'interroger également sur l'utilité même de ces fonds et sur le bien-fondé des principes qui sous-tendent leur action".
Selon elle, les actions de l'Agefiph et du FIPHFP mériteraient en tout cas d'être "harmonisées" dans la mesure où il existerait aujourd'hui "des différences importantes de traitement dans la prise en charge des travailleurs handicapés" entre secteur privé et secteur public. La mise en place de deux organismes différents aurait finalement conduit "à une logique de gestion administrative" plutôt qu'à "une démarche stratégique des publics ciblés", regrette la Cour. Laquelle recommande in fine "d'évaluer l'intérêt de maintenir le FIPHFP", privilégiant plutôt "une affectation directe de crédits", et de "recentrer l'Agefiph sur des missions spécifiques" basées sur une "analyse précise des besoins des personnes handicapées".
Pour soutenir la politique d'insertion, elle préconise de "déterminer le financement nécessaire sur le long terme et fixer en conséquence les modalités de la contribution à la charge des employeurs privés et publics".
Contacté par Localtis, le FIPHFP indique souhaiter analyser en détail le contenu du référé et consulter son comité national avant de formuler une réponse officielle. Les représentants du FIPHFP ont eux-mêmes régulièrement fait état des faiblesses du modèle actuel de financement, que ce soit par la voix du président du Fonds, Dominique Perriot, ou de son directeur, Marc Desjardins (voir nos articles ci-dessous).
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