Le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires vient de diffuser par la voie d’une nouvelle instruction, mise en ligne ce 8 janvier, les lignes directrices relatives à la gestion quantitative de la ressource en eau et aux situations de sécheresse issues du cadre réglementaire posé par les décrets n° 2021-795 du 23 juin 2021 et n°2022-1078 du 29 juillet 2022.
Le premier texte vise à mieux encadrer les autorisations de prélèvement, notamment pour les cultures, et renforcer le rôle du préfet coordonnateur de bassin en matière de cadrage et de portage des études d'évaluation des volumes prélevables sur les territoires identifiés en déséquilibre à l’étiage et d’approbation de leur répartition entre usages.
Le second pris dans le sillage du Varenne agricole de l'eau et de l'adaptation au changement climatique le complète en y ajoutant entre autres une dimension d’évaluation des volumes pouvant encore être rendus disponibles "en dehors de la période de basses eaux" pour les usages anthropiques. Cette étape réglementaire "importante" depuis la loi sur l’eau de 2006 a bénéficié d’un "nouveau coup de projecteur" dans un contexte d’intensification des épisodes de sécheresse avec la présentation du plan Eau par Emmanuel Macron le 30 mars 2023, qui acte "l’urgence à entrer dans l’ère de la sobriété et des économies d’eau", relève le ministère.
Nécessaire articulation entre les différents outils (Sage, PTGE, AUP…)
Le maître mot est la coordination. Et ce afin de garder "une cohérence territoriale" entre volet structurel, en vue d’une gestion équilibrée et durable de la ressource, et conjoncturel, pour une meilleure gestion des crises et des sécheresses. En d’autres termes, la gestion de crise n’a pas pas vocation à jouer le rôle de palliatif des écarts entre autorisations de prélèvement délivrées et capacités réelles des ressources. Le retour à l’équilibre structurel d’un bassin sur la base d’un volume prélevable à l’étiage doit précisément permettre "de réduire statistiquement la fréquence de conditions nécessitant des mesures temporaires de restrictions", note l'instruction.
Par ailleurs, lorsqu’il est fait référence à des concertations territoriales - sur les volumes prélevables, les projets de retenues, les autorisations uniques de prélèvement ou le programme de mesures de retour à l’équilibre quantitatif - "il ne peut s’agir que de concertation dans le cadre d’un schéma d’aménagement et de gestion des eaux (Sage) ou d’un PTGE [projet de territoire pour la gestion de l’eau]", insiste-t-elle. L’instruction de la demande et la décision d’autorisation unique de prélèvement (AUP) devra donc tenir compte du programme de retour à l’équilibre des PTGE ou Sage. "Ce lien permettra de mieux justifier à la fois l’évitement, la réduction d’impact et le choix du projet par rapport à des alternatives". Autre lien essentiel à faire, celui entre stockage hivernal et réduction de prélèvements directs à l’étiage. "Les nombreux contentieux, dans certains secteurs, sur la construction de réserves sont en partie alimentés par (cette) absence de lien", explique le ministère.
Définir sans tarder une stratégie de bassin
C’est au préfet coordonnateur de bassin de piloter et coordonner une stratégie d'évaluation des volumes prélevables. Celle-ci, qu’il convient de définir "sans tarder", se devra "d’être claire et facilement disponible pour le grand public", souligne l’instruction. Pour ce faire, une note récapitulative portant les éléments de cette stratégie et des études existantes doit regrouper sur un portail internet les informations à mettre à disposition du public (récapitulés en fiche 1 de l’annexe). Etant précisé qu’à défaut de note récapitulative, c’est le Sdage (schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux) qui vaut stratégie de bassin. L’inventaire des zones de répartition des eaux (ZRE) existantes arrêtées dans le bassin -caractérisées par une insuffisance chronique des ressources en eau par rapport aux besoins - devra également être rendu public et accessible (fiche 5), si possible sur le même site que la stratégie de volumes prélevables, et tenu à jour.
Priorité aux études d’évaluation en période d’étiage
Il est important de faire la distinction entre les études des volumes prélevables à l’étiage, qui constituent "la base de toute démarche de retour à l’équilibre", souligne le ministère, et les études hors période de basses eaux (fiche 2), dont les objectifs diffèrent. Pour les premières, il s’agit d’analyser les impacts cumulés de l’ensemble des prélèvements directs dans la ressource en période de basses eaux, tous usages confondus, et de déterminer une valeur maximale permettant de respecter les besoins du milieu. "Il est donc prioritaire de connaître cette limite pour y faire correspondre les volumes autorisés en modifiant les autorisations".
Hors période de basses eaux, l’enjeu est autre "car globalement les bassins ne sont pas structurellement en déséquilibre sur cette période", remarque-t-il. Ces études ont un "objectif de connaissance de la situation des prélèvements et stockages existants au regard de l’hydrologie annuelle des nappes et des cours d’eau". Cette démarche doit notamment permettre de "vérifier la possibilité d’honorer les volumes à stocker qui sont étudiés dans le cadre de la concertation locale".
Il y a toutefois deux poids deux mesures…Les processus de renouvellement d’AUP ou de demandes de nouvelles AUP à court terme "doivent se poursuivre sans attendre", note ainsi l’instruction. En outre, à l’aune de l’argument des capacités de portage et de financement, "priorité devra être donnée à la réalisation des études d’évaluation des volumes prélevables à l’étiage manquantes ou à réviser". Pas question cependant de faire table rase. Le décret donne un statut et un cadrage réglementaire à des outils existants "qu’il n’est donc pas nécessaire de réviser systématiquement à la suite de sa publication ou au renouvellement des AUP". L’opportunité de réviser, mettre à jour ou compléter les étude existantes de volumes prélevables à l’étiage relève là encore de la stratégie du préfet coordonnateur de bassin.
Référence : instruction du 14 décembre 2023 relative à la mise en oeuvre du décret n° 2021-795 du 23 juin 2021 et du décret n° 2022-1078 du 29 juillet 2022 relatifs à la gestion quantitative de la ressource en eau. |
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